© Estelle Deschamp

Exposition Avec précipitation

Estelle Deschamp

TERMINÉ

Depuis 2005, l’artothèque de Pessac invite chaque année un artiste dans le cadre d’une création d’exposition soutenue par la DRAC Nouvelle-Aquitaine. Après Stéphane Couturier, Abdelkader Benchamma, Philippe Fangeaux, Laurent Le Deunff, Cédric Couturier, Laurent Sfar, Joachim Schmid, Detanico & Lain, Pierre Labat et Sébastien Vonier, Hippolyte Hentgen, Julien Nédélec, Guillaume Pinard, Chourouk Hriech, l’artothèque a le plaisir d’accueillir Estelle Deschamp en 2019.

Estelle Deschamp est une artiste éclectique, s’inspirant des styles anciens comme de l’imaginaire futuriste. Alliant librement une multiplicité de matériaux -bois, plâtre, béton, goudron, mousse, plastique, rebuts en tous genres -, elle crée des constructions fantastiques. Elle présente à l’artothèque une installation qui s’organise autour de la projection d’une vidéo montrant la formation d’un précipité chimique. Le caractère contemplatif des images stimule l’imagination du spectateur, l’amène à reconnaitre des formes connues, comme lorsqu’on regarde les nuages (principe de la paréidolie). Dans l’espace, les déclinaisons sculpturales sont présentées comme la traduction du passage de la phase soluble du précipité à la phase solide.

« Avec précipitation, ici, le temps s’est arrêté. Les portes grandioses de la cité se sont refermées. A la manière d’un instantané, la pierre s’est figée sous l’eau encore ruisselante. Goutte à goutte, la terre s’irrigue, charriant son lot de sédimentation qui s’accumule en une entité protéiforme qui enfle à bas bruit. Mouvement au ralenti d’une concrétion qui vise irrésistiblement à sortir d’une obscurité trop longtemps imposée. Au promeneur errant dans ces allées ancestrales, le rai de lumière n’atteindra la surface hybride que pour se réfléchir et faire retour sur sa rétine, se constituant ainsi comme objet regard. Tapies dans l’ombre, les masses troglodytes se gorgent patiemment. Elles attendent. Depuis des siècles, elles attendent.

Jadis, cette cité fantasmée avait eu sur elle un effet agalmatique. Elle l’avait su. Elle l’avait oubliée. Et désormais, elle en conservait l’intuition, sans pour autant pouvoir en dire autre chose. A quelle incarnation la rapporter ? Elle l’avait connue. Elle l’avait rencontrée. Était-ce à l’état de rêve ou à l’état de veille ? Elle évoquait en elle les vagues réminiscences d’une prime jeunesse. Des colonnes translucides où plongent des astres nébuleux aux nuances pourprées. Des voies de cheminement où viennent à se loger les calcifications des formations pulsionnelles. Comme les restes rigidifiés des forces inhérentes poussant à restauration d’un état mobile antérieur. La roche gronde et ne demande qu’à être libérée. Assurément, elle attendait son heure.

Là où le visiteur doit dérober son regard pour éviter la capture imaginaire et la pétrification du discours, les concrétions précipitées inventent un langage inédit qui nous permet aussi de poser un regard sur l’invisible du réel. Ce réel qui ne se donne pas. Ce réel qui ne s’entrevoit qu’à être longé, approché, frôlé parfois mais jamais attrapé. Avec précipitation, c’est le mouvement qui tend à devenir immobile, et pourtant perceptible, poussée jusqu’à son extrémité. Une urgence décélérée. »
Yann Le Fur

Reportage du JT de France 3 sur l'exposition

Estelle Deschamp a notamment exposé à la galerie Silicone – Bordeaux et à la Villa Arson – Nice en 2016, Au Blockhaus DY10 – Nantes en 2018, au 6B – Saint Denis en 2019…

Commissariat : Anne Peltriaux et Corinne Veyssière

Aide à la création DRAC Nouvelle-Aquitaine 2019

Avec le soutien de FACTS – festival arts et sciences de l’Université de Bordeaux

En partenariat avec l’ISM – Institut des Sciences Moléculaires Bordeaux et avec Cap Sciences