Morgane Jouvencel, Genestra, 2025 ©ADAGP

Exposition Genestra : seuil d’une photosynthèse tellurique

Morgane Jouvencel

EN COURS

Depuis 2005, l’artothèque de Pessac invite chaque année un·e artiste à concevoir une exposition originale soutenue par la DRAC Nouvelle-Aquitaine. En 2025, elle a le plaisir d’accueillir Morgane Jouvencel.

L’exposition Genestra, accompagnée par l’équipe de l’artothèque, offre à l’artiste un soutien complet et attentif à chaque étape du projet – de la phase de recherche à la réalisation in situ – favorisant l’expérimentation et l’exploration de nouvelles formes plastiques. Elle s’inscrit dans un cadre professionnel stimulant, sous le commissariat d’Anne Peltriaux et Corinne Veyssière, co-directrices artistiques de l’artothèque, et bénéficie de la rédaction d’un texte critique par Samy Lagrange, ainsi que d’un travail éditorial (Edition] et de communication approfondi.

L’artiste est également accompagnée par Alexandre Castéra, régisseur de l’artothèque, qui contribue à la mise en œuvre technique du projet et à la recherche de solutions adaptées aux exigences plastiques et matérielles de l’exposition.

Le projet s’inscrit dans une dynamique de médiation culturelle et éducative, portée par des actions menées à destination du réseau professionnel, des enseignants et des publics.

Un temps de présentation et de formation par l’artiste, Christelle Seguin, chargée des actions pédagogiques à l’artothèque et Bernard Pradier, conseiller pédagogique arts visuels DSDEN, est dédié aux enseignants. Un dossier pédagogique leur est remis à cette occasion.

Pendant toute la durée de l’exposition, des classes sont accueillies lors de visites commentées de l’exposition, accompagnée d’ateliers d’expérimentation permettant aux élèves d’appréhender la démarche de l’artiste.

L’exposition implique activement les adhérents de l’artothèque [particuliers, CHU de Bordeaux SG Sud-Ouest, Bordeaux Métropole, La Mie Câline…] dans une démarche de réemploi et de valorisation des matériaux, notamment l’aluminium ayant servi à la fonte des sculptures de Morgane Jouvencel, inscrivant ainsi l’exposition dans une logique écologique et collaborative.

Enfin, l’artothèque organise des rencontres professionnelles pour les acteurs culturels de la Région Nouvelle-Aquitaine et au niveau national, notamment des réseaux BAC – Bordeaux Art Contemporain, Astre – Réseau arts plastiques & visuels Nouvelle-Aquitaine & ADRA – Association de Développement et de Recherche sur les Artothèques, favorisant les échanges professionnels et les collaborations artistiques.

Samy Lagrange «GENESTRA Seuil d’une photosynthèse tellurique»

Dans le noir, les roches éclosent et les pierres poussent. À l’abri des regards, un peuple minéral s’anime. Au cœur de l’artothèque, Morgane ouvre une brèche temporelle et vous invite à pénétrer dans un monde où l’humain a disparu. Elle n’est pas la prédicatrice de l’effondrement à venir, mais cherche à révéler ce qui se trame dans les sous-sols de l’anthropocène et perdurera bien après nous.

Notre conception du vivant est étrangement restreinte. Elle est fondée sur le semblable et nous n’en octroyons les privilèges qu’à ceux qui nous ressemblent. Ainsi, les êtres dépourvus de la faculté de mouvement, ceux qui ne peuvent se déplacer ou fuir, sont exclus de cet empire. En prédateurs, nous ignorons l’inerte, refusant de considérer ce qui craque et ce qui tremble comme des signaux de vie.

Depuis toujours, Morgane observe les mouvements de ce qui semble immobile. Là où rien ne bouge, elle scrute obstinément les indices d’un changement. Mais il faut pouvoir s’affranchir de la perception humaine pour apercevoir les continents se détacher, les sols s’affaisser, et les argiles s’assécher. Ces mouvements, ces vies sont indiscernables pour nous, trop loin de notre référence. Il nous faudrait fixer les sols durant des milliers d’années pour les voir bouger. Il nous faudrait transformer notre vision, arracher nos yeux, voir autrement.

Pourtant, la forme du paysage mute constamment. A la faveur d’un tremblement, voyez-le essayer de se renverser, de se transformer radicalement, d’un mouvement soudain qui dure des siècles. Morgane observe le paysage-créature ; il est vivant.

Alors, pour montrer que l’inerte à nos yeux est agité en vérité, Morgane nous projette dans des futurs spéculatifs. Il n’y est pas question d’utopie ou de dystopie. Elle élabore des narios, des possibilités, des peut-être et des pourquoi pas. Contemplez alors, aux confins des mondes catastrophés, les paysages s’hybrider :

Dans le post-post-post-anthropocène, les règles ont changé, le paradigme s’est renversé. Genestra ressemble à une mine abandonnée. Débarrassée de l’activité humaine, elle retrouve sa fonction initiale et, soudain, s’agite nouvellement. Depuis le plafond, les terres et les métaux dégoulinent, se séparent et s’enlacent à nouveau en direction du sol. De cette intrication, surgissent des cocons de cristal. Encore un peu craintifs, les cristaux s’accrochent et se répandent sur les murs, transpercent le sable noir. À l’intérieur, des créatures minérales s’embryonnent et se préparent à éclore. Comme des intrus involontaires, égarés dans un monde étranger, vos pas se feutrent et vos mouvements se font prudents à mesure que vous pénétrez dans cette nurserie.

Une lumière nouvelle s’origine dans le noir minéral. Comme un anti-soleil venu des profondeurs, elle foudroie le cristal et refroidit les corps de pierre. Sous cette lumière glacée, la gestation progresse, et la créature grandit – ou plutôt s’expand, se répand. Entendez-la gronder et gémir, voyez-la tentaculer et se fondre dans le paysage. Comme un avertissement, la température chute légèrement. Peut-être se prépare-t-elle à prendre sa revanche. Peut-être existe-t-elle sans le souvenir de l’humanité.

En vérité, le processus de cette photosynthèse tellurique nous échappe presque totalement, défie trop profondément nos imaginaires, dépasse tous nos soupçons. Cette pépinière n’est probablement qu’un sas, le seuil d’un monde qui se poursuit bien au-delà des murs de l’artothèque, dans le temps et l’espace. Genestra est un peuple radicalement inconnu ; qui ne fait qu’un avec son territoire et marche sur des morceaux de lui-même. Morgane esquisse les contours d’un scénario incomplet qu’il nous appartient de croire ou de craindre.

Morgane utilise les esthétiques de la science-fiction pour leur capacité spéculative. En imaginant les fragments d’un monde éventuel, elle révèle l’ampleur de notre cécité dans le réel, et rebat notre vision du vivant. En réponse à la sonde Voyager 1 qui recherche dans l’espace de nouvelles formes de vie, Genestra est une capsule à destination de l’humanité qui émet ce même avertissement : “vous n’êtes pas seuls”.

Biographie de Morgane Jouvencel
Morgane Jouvencel est une jeune artiste plasticienne originaire de Montpellier.
Aujourd’hui elle vit et travaille entre la Dordogne et Bordeaux.
Formation
Diplômée de l’ESAD de PAU en 2020 et de l’ENSAD de Limoges en 2023, elle obtient sa première exposition personnelle en 2022 à Bordeaux au Continuum.
Expositions
Depuis son DNSEP obtenu en juin 2023 elle a été sélectionnée par le CAC Meymac pour l’exposition Première, 29ème édition , et par le CIAP de Vassivière pour une résidence en 2024. En juillet 2024 elle présente son travail lors de sa seconde exposition personnelle en Bretagne avant d’exposer au FRAC MECA Nouvelle Aquitaine dans l’exposition collective Primavera, Primavera. Enfin, elle lance son podcast Sanstitre404 en Mars 2025
« Penser des fictions climatiques, exploiter une biologie profane et naïve, et intégrer la culture de la science- fiction sont mes trois grands axes de recherche. Entre spéculation pseudo-scientifique et fascination de la matière, j’imagine les suites des désastres. Les Narios deviennent des passerelles vers d’autres espaces à d’autres moments.
Ainsi, mes œuvres sont des chimères piochant parfois dans l’anatomie humaine, animale, entomique et dans la xénomorphologie à des échelles différentes.
J’ouvre la porte à un nouvel univers plastique sculptural fantastique car c’est en imaginant de nouvelles entités, qui frôlent la question du vivant, que l’espace de représentation devient multiple entre ses limites physiques et l’univers que les pièces apportent avec elles. J’entreprends de nouvelles corpulences paréidoliques qui deviennent alors supports de projections pour le·a regardeur·euse. – La paréidolie est un réflexe du cerveau qui nous pousse à coller une image, à essayer d’identifier quelque chose d’abstrait-. Lorsque l’on ne reconnaît pas une forme, nous avons cette tendance à nous en approprier la réalité afin de la comprendre. En faisant un parallèle avec la science-fiction comme espace d’anticipation, j’entreprends la même démarche par le volume, le dessin et l’installation.
Depuis mon enfance jusqu’à aujourd’hui, les films tels que Dune, La Guerre Des Mondes, Terminator, Alien ou encore Premier Contact sont au cœur de mes influences. »
https://morganejouvencel.net/
www.instagram.com/morganejouvencel

21 novembre 2025 à 19h

Vernissage de l’exposition
En présence de l’artiste

06 décembre 2025 de 14h à 16h

Atelier Récréo’mur
Atelier famille ludique et créatif destiné aux enfants (5/12 ans) avec leurs parents autour d’une visite-découverte de l’exposition.

Informations et réservations
05.56.46.38.41
contact@lesartsaumur.com

les 21 & 22 mars 2026 de 14h à 18h

Week-end Musées Télérama
Ouverture exceptionnelle de l’artothèque
samedi et dimanche

Des surprises pour petit·e·s et grand·e·s tout le week-end: Visites Flash Famille, Goûters, Visite & Finissage en présence de l’artiste.

Informations et réservations
05.56.46.38.41
contact@lesartsaumur.com