À l’occasion de son exposition personnelle à l’artothèque « Tous les prétextes », Laurent Lacotte présente un corpus d’œuvres mêlant objets photographiques, textes et estampes. Il réunit aussi et pour la première fois une série d’éditions récentes. Les objets photographiques témoignent d’actions poétiques à protocoles réalisées en divers lieux dont certaines en Aquitaine.
De retour dans son territoire originel, il convoque les fantômes de son passé, troublant écho au chaos de notre époque. Au-delà du strict périmètre de la salle d’exposition, des interventions in-situ viennent se nicher dans la ville de Pessac.
« Lorsqu’il entre dans la salle d’exposition au sol jonché de boîtes à images*, le visiteur pose instantanément son regard sur le grand mur de gauche où sont inscrits en lettres capitales les mots « Ici et maintenant » et « toujours ailleurs ». Ces deux associations pourtant antinomiques renseignent sur le caractère contextuel du travail plastique de Laurent Lacotte, dont les créations sont à chaque fois pensées in situ. Fortement ancrées dans le présent dont elles expriment l’immédiateté, elles sont par définition provisoires, éphémères, aussi précaires que le vivant. […]
[…] C’est à cet endroit que se situe la part poétique du travail plastique, dans cette faculté à pouvoir s’extraire du monde pour en parler, être « ici et maintenant » et, en même temps, « toujours ailleurs ». […]
[…] Les « prétextes » du titre de l’exposition ne servent pas ici d’excuses à un désengagement. Au contraire, tout devient prétexte pour engager un geste de résistance. À l’été 2021, Laurent Lacotte inscrivait sur l’une des parois du kiosque du square des Batignolles à Paris : « JE SUIS ENCORE LÀ ». Là au sortir d’un confinement planétaire, là malgré les vicissitudes de la vie, là pour commémorer ceux qui ne sont plus, là pour vivre enfin et simplement. […]
Extrait du texte de Guillaume Lasserre accompagnant l’exposition personnelle « Tous les prétextes »
À l’occasion de l’exposition, Laurent Lacotte a demandé à Guillaume Lasserre* et Jean-Christophe Arcos**, tous deux critiques d’art et commissaires d’exposition, d’échanger autour de sa pratique. En douze mots-clefs, tous deux reviennent sur ce qui préside au travail de l’artiste.
Voici un court extrait de ce résultat.
Mot 1 : Prétextes
Et si justement il n’y en avait aucun ? Si précisément les causes (dis)simulées habituellement pour faire de l’art étaient pour une fois avouées, revendiquées ?
L’art tiendrait à l’artificiel, l’artiste prenant prétexte d’une inspiration pour montrer (ce) qu’il a produit.
Au contraire, je crois dur comme fer que Laurent Lacotte met en œuvre une nécessité – son travail est ancré dans un déterminisme, dans un déjà-là, tout autant que dans la responsabilité de faire advenir quelque chose en commun.
Jean-Christophe Arcos
Mot 12 : Encore
Le monde ne manque pas de contradictions, l’humanité de discordance. Parce que la création artistique est pour lui viscérale, Laurent Lacotte produit comme il respire, selon une nécessité qui malgré l’incertitude résonne comme une promesse. « Jamais rien d’autre. D’essayé. De raté. N’importe. Essayer encore. Rater encore. Rater mieux » a écrit Samuel Beckett dans Cap au pire . L’assertion pourrait être érigée en mantra par l’artiste tant son œuvre reflète une ambition évidente: non pas d’être parfait mais simplement humain.
Guillaume Lasserre
Rencontre avec Laurent Lacotte